Au Pays de la Téranga, la loi reste une belle cage qui enferme les faibles et les pauvres dans un ensemble de règles, de procédures et de sanctions potentielles. Le Droit sénégalais demeure en pratique un paquet de privilèges réservé à une caste cosmopolite de biens-nés et de parvenus pour leur jouissance exclusives. Ainsi les Sénégalais admettent volontiers que les citoyens ne naissent pas tous égaux en droit et ils savent que la loi ne s’applique qu’à ceux qui n’ont pas de recours. On ne peut s’empêcher de s’apercevoir l’incidence de cet axiome dans le comportement citoyen. On ne parle de DROIT pour le peuple que lorsqu’il s’agit de renforcer ou d’élargir le Pouvoir des élites : droit au vote. Le langage courant en fournit des illustrations à souhait : « le pauvre n’a pas de droits ; l’accès au droit voudrait que le pauvre se hissa sur quelqu’un ; le pauvre (celui qui n’a ni relations ni argent) doit faire attention. »
L’impact de cette vérité bien de chez nous se traduit dans la recherche effrénée des boucliers que sont les syndicats, les partis politiques, les cercles occultes, les confréries et sectes religieuses.
D’abord il y a le club des fils de « SOXNA » autrement dit ceux-là qui croient que leurs mamans sont meilleures que celles des autres puisqu’ils ont la certitude que leurs pères, Guides religieux, sont supérieurs à tous les hommes du Pays. Aucune loi ne leur est applicable même celle de DIEU. Ils sont convaincus d’échapper même à la justice divine grâce aux statuts de sainteté de leurs familles qui les absolvent de tout pêcher bien avant leur naissance. Leurs manquements multiformes à l’éthique, à la morale et à la loi sont endossés par la piété de leurs ancêtres fondateurs les rendant ipso facto nuls et non avenus. Ils conjuguent impunité, immunité et arrogance, encouragés par la force alliée de l’occultisme, du mystique et du gourdin.
Un fils de « SOXNA ne commet pas un délit encore moins une contravention, qui dans leur milieu sont imputé à la tortuosité des juvénilités ou alors carrément à l’œuvre de SATAN. Un crime de l’un d’entre ces privilégiés renforce son statut d’homme exceptionnel et élargit le cercle de ses disciples. Leurs infractions ne relèvent que de la haute cours de leurs propres familles où les seules peines applicables sont les réprimandes paternelles enjointes de privation de sorties médiatiques ou d’assignation à résidence pour un ou deux mois.
Ainsi tous ceux qui sont susceptibles d’être un jour poursuivi par la justice ou la clameur populaire font acte d’allégeance à un cercle ou une secte et se créent des alliances avec une famille religieuse.
Puis suivent le PRINCE et ses invités d’honneurs à la table du Parti au pouvoir : Les militants de la première heure, les inconditionnels laudateurs, les marchands de sagesses et les porteurs de voix. Ceux qui ont permis l’accès au pouvoir et qui offrent la certitude de sa conservation doivent en jouir pleinement. Leurs incartades seront maquillées, diluées dans des règles de procédures puis effacées d’un coup magique de non lieu total ou d’un classement sans suite.
En fin la horde des leaders syndicaux et chefs de lobbies qui gèrent la colère et la frustration populaire. Ils organisent, alimentent et maintiennent le mécontentement qui fait d’honnêtes et crédules citoyens une meute en furie. Experts dans l’art d’user et d’abuser de slogans patriotiques, ils sont aussi stratèges dans le chantage et passent à l’action sans état d’âme pour paralyser toute activité économique quitte à pourrir la vie sociale et désagréger le tissu industriel. Les intérêts moraux et matériels des travailleurs sont leur fonds de commerce, voie royale à la jouissance des prébendes qu’ils arrivent à conserver même à la retraite…ces Robins des Bois des temps modernes sont aussi des intouchables non seulement dans leurs activités syndicales mais dans leurs actes privés et personnels.
Ces trois sénégalais, hors du commun, ont l’onction populaire et nous sommes en république où mieux vaut ne pas fâcher l’électeur la veille d’un scrutin.